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Citations

 

Il existe plusieurs passages dans le Talmud traitants de celui que l'on nomme "Yeshou", et plusieurs avis sur ce personnage. Pour certains, ils se rapportent à Rabbi Yeshou'a, mais pas pour d'autres. Par exemple, pour Rabbénou Tam (Shabbat 104b) ou Tossefot HaRosh (Sotah 47a), ces haggadot ne parlent pas du Nazaréen. Certains avancent qu'en réalité, ils croyaient réellement que l'on parlait de lui, mais disaient le contraire par peur des persécutions.

Si plusieurs éditions du Talmud ne les contiennent pas en raison de la censure, ils peuvent néanmoins être retrouvés dans d'anciens manuscrits, ou de récentes éditions qui les ont inclus de nouveau. Voyons les principaux :

 

Dans le Traité Guitîn 57a, il est rapporté que le célèbre Onqelos (qui traduisit la Torah en araméen, ce que l'on appelle le Targoum) utilisa la nécromancie afin de demander à des défunts quel était leur état après la mort. Voulant se convertir à la Torah d'Israël, son but était de savoir si il ferait le bon choix ou non. Il eut donc un contact avec Bil'âm et un certain Yeshou. « Fidèle » à sa méchanceté, même dans le shéol, le magicien noir lui révéla qu'il ne devait pas chercher le bien-être d'Israël, et s'attacher à eux. Puis, Onqelos eut un contact avec Yeshou, qui lui révéla lui qu'il devait chercher le bien-être d'Israël, car les Juifs sont comme la pupille de l’œil d'HaShem. La Guémara continue en disant que la punition de Yeshou est de bouillir dans des excréments brûlants, car il s'agit de la punition pour s'être moqué des paroles des Sages.

 

Dans le Traité Sanhédrîn 43a, il est dit : « La veille de la Pâque, ils ont suspendu le cadavre de Yeshou le Nazaréen après l'avoir tué par lapidation. Et un crieur est sorti devant lui pendant quarante jours, proclamant publiquement : Yeshou le Nazaréen va être lapidé parce qu'il pratique la sorcellerie, incite les gens au culte des idoles et égare le peuple juif. Quiconque connaît une raison de l'acquitter doit se manifester et l'enseigner en son nom. Et ils n'ont pas trouvé de raison de l'acquitter, alors ils l'ont lapidé et ont suspendu son cadavre la veille de la Pâque ». Cette Guémara continue en rapportant que Yeshou était incitateur au culte des idoles, qu'il avait des liens étroits avec le gouvernement des Goyim, ou encore qu'il avait cinq disciples du nom de Mattai, Nakai, Netzer, Buni et Toda.

 

Toujours en Sanhédrîn, 103a, il est dit que Yeshou le Nazaréen fautait et faisait fauter les autres.

 

Dans le Traité Shabbat 104b, le « fils de Pandera » (Yeshou) rapporte qu'il a appris la sorcellerie en Égypte, lui permettant de réaliser des « miracles ».

 

Enfin, l'anecdote la plus « connue » reste celle de Sanhédrîn 107b (et Sotah 47a) rapportant : « «  Que toujours, ta gauche repousse et ta droite rapproche ». Pas comme Elisha qui a repoussé Gehazi des deux mains ni comme Josué ben Perahyah qui a repoussé Yeshu le Nazaréen des deux mains ». Et la Guémara de commenter : « Qu’en est-il de Josué ben Parahyah ? Lorsque le roi Jannée assassina les maîtres, Josué ben Parahyah et Jésus s’enfuirent à Alexandrie d’Égypte. Quand la paix fut rétablie, Siméon ben Shetah envoya [un message] : “De moi, Jérusalem la ville sainte, à toi Alexandrie d’Égypte : Ma sœur, mon mari réside en toi, et moi je suis dans l’affliction”. [Ainsi], ils partirent et trouvèrent une auberge (ushpiza) où ils furent reçus avec beaucoup d’honneurs. Il dit [Josué ben Parahyah] : “Combien belle est cette auberge (ahsania) !” Il lui dit [Jésus] : “Ses yeux sont ronds” (ils ont mauvaise apparence). Il lui dit : “Mécréant ! C’est de cela dont tu t’occupes”. Il sortit quatre cents trompettes et le mit au ban. Jésus revint vers lui plusieurs fois et lui disait : “Reprends-moi”, mais il ne lui prêtait pas attention. Un jour, alors qu’il récitait le Shema, il [Jésus] vint devant lui, [Josué ben Parahyah] pensa l’accepter et lui fit un signe de la main. Il pensa [Jésus] qu’il était repoussé. Il sortit, dressa une brique (lebeinta) et se prosterna devant elle. Josué ben Parahyah lui dit : “Repens-toi !” Il lui dit [Jésus] : “J’ai reçu de toi : Celui qui faute et qui fait fauter autrui, on ne lui donne pas les moyens de se repentir.” Mar dit : “Jésus a pratiqué la sorcellerie, a séduit et a fourvoyé Israël” ».

Pertinence

 

Il faut noter, en premier lieu, qu'il existe deux Talmud, le Yéroushalmi (de Jérusalem) et le Bavli (de Babylone). Le premier est antérieur au Bavli, et ne mentionne jamais le nom de Yeshou. Certaines histoires sont partagées par les deux Guémarot, mais le Bavli ajoute le nom Yeshou là où le Yéroushalmi ne cite aucun nom spécifique, ou un autre.

 

Par exemple, si nous reprenons la citation de Sanhédrîn 107b, comparons-la avec celle du Yéroushalmi : « Le peuple de Jérusalem voulait nommer Judah ben Tabbaï président [du Sanhedrin] de Jérusalem. Il s’enfuit et vint à Alexandrie. Les enfants de Jérusalem écrivaient de Jérusalem la grande à Alexandrie la petite : “Jusqu’à quand mon fiancé va-t-il résider chez vous alors que moi, je l’attends avec tristesse.” Il s’embarqua. Il dit : “Déborah, la maîtresse de maison qui nous a reçus, que lui manquait-il ?” Un de ses élèves lui dit : “Rabbi, un de ses yeux est blessé.” Il lui dit : “Tu as commis deux fautes ! La première est de m’avoir soupçonné et la seconde est de l’avoir regardée. Ai-je dit qu’elle était belle ? Je n’ai parlé que de ses actions.” Il [l’élève] s’énerva et partit ».

 

L'histoire est ici beaucoup plus concise, ne cite pas le nom du disciple, et ne contient pas la phrase finale stipulant que « Yeshou a pratiqué la sorcellerie ». La seule hypothèse acceptable, c'est que le nom de Yeshou a été ajouté postérieurement et mis par écrit dans la future Guémara du Bavli, comme attaque envers le Jésus créé par le christianisme d'Edom.

 

Il y a, de plus, un gros anachronisme présent. En effet, Yeshou est présenté ici comme étant le disciple de Josué ben Perahyah, qui a vécu environ un siècle avant l'ère commune. Cependant, tous les autres témoignages Juifs rapportent que le Rabbi a vécu sous l'ère d'Hérode et de son fils, Archélaos. De plus, en un autre endroit, il est dit que la mère de Yeshou, Myriam, était mariée à Papouss Ben Yéhouda, que connaissait Rabbi 'Aquiva (B'rakhot 61b), qui est né vers 50 de l'ère commune.

 

Ainsi, si nous croyons ces deux Guémarot, cela signifierait que Yeshou aurait vécu environ un siècle et demi... avant ses parents.

 

D'ailleurs, cet anachronisme est également rapporté ici (« Pirké Avot », édition Torah-box p.37) : « Dans « Séfer ha'Kabala », le Raavad écrit : d'après les historiens Juifs qui se fondent sur ce passage Talmudique, Jésus de Nazareth était le disciple de Rabbi Yéhoshou'a ben Péra'hya, à l'époque du roi Yanaï, alors que d'après les historiens des autres nations, Jésus fut arrêté à l'époque d'Hérode et pendu sous le règne d'Archélaüs, son fils...il y a une différence de plus de cent ans entre les deux traditions...et la nôtre est authentique ! ».

 

Cependant, il y a ici plusieurs imprécisions : ce ne sont pas les « historiens des autres nations » qui disent que le Rabbi a été arrêté à l'époque d'Hérode, mais tout simplement les auteurs de ces récits, soit des Juifs de Torah (Matityahou, Marcos qui a écrit selon les paroles de Shim'ôn Kéfa, Loucas un converti au Judaïsme selon beaucoup d'avis, et Yo'hanân, principalement). Il s'agit donc également d'une Tradition orale Juive, mise ensuite par écrit, authentique. De plus, comme nous l'avons souligné, ce récit est présent dans le Talmud Yéroushalmi dans une tout autre forme, sans la présence du nom Yeshou. Cette tradition dans la Guémara Bavli n'est donc pas authentique.

 

De même, dans Guitîn 57a, où Onqelos fait venir des morts par nécromancie, les anciennes versions n'ont pas Yeshou mais « les pécheurs d'Israël » à la place.

 

La citation de Sanhédrîn 43a est également inexacte, et montre un mélange de faits historiques et de mythes. Si le Rabbi a bien été tué la veille de Pessa'h, il n'a jamais été lapidé puisque les romains ne lapidaient pas avant de clouer un homme sur le bois. Ce type de mise à mort était bien Juive. Mais alors un autre problème se pose, puisque selon la Mishna : "Rabbi Yéhoudah dit : on ne retarde pas un jugement mais on l’exécute immédiatement" (Sanhédrîn 89a), repris par le Mishné Torah : "Une fois la condamnation prononcée, on ne fait pas attendre, mais on l'exécute le jour-même" (Hilkhot Sanhédrîn, 12:4). Or, si un crieur est sorti et a annoncé que "Yeshou" serait lapidé, cela signifiait que son jugement avait été rendu. Car proclame-t-on dans les rues la mort d'une personne par le Sanhédrîn sans comparution ? Mais pourquoi attendre quarante jours ? Il s'agit d'une transgression de la Torah !

 

De plus, à aucun moment il n'a enseigné le culte des idoles en Israël, et c'est justement son opposition aux Tsadouqim, affiliés au gouvernement romain, qui l'a conduit à la mort, et non des « liens étroits » avec lui. Quant au nom des disciples et leur nombre, il s'agit également d'un folklore n'ayant aucune source sérieuse et authentique.

 

Résumé

 

Les anecdotes d'un certain Yeshou apparaissent dans le Talmud Bavli et non dans le Talmud Yéroushalmi, antérieur, et contenant parfois les mêmes histoires, mais avec des personnages différents ou anonymes. La Guémara du Bavli ayant été finalisée vers l'an 500 de notre ère (la Guémara du Yéroushalmi vers l'an 350-400), elle ne fait nullement mention de Rabbi Yéshou'a de Natsérèt, ayant vécu plusieurs siècles plus tôt, mais s'attaque, par ses remarques plus ou moins acerbes, au Jésus créé et véhiculé par le christianisme d'Edom. A l'époque de la mise par écrit de la Guémara, le christianisme était déjà la religion officielle de Rome et prônait déjà les doctrines païennes connues jusqu'à nos jours, ainsi que l'abolition de la Torah et des mitsvot.

 

De plus, ces anecdotes ont été « enrichies » au fil du temps, par l'ajout, en plusieurs endroits, du terme « nazaréen », afin de bien préciser le Yeshou visé. Cependant, même au sein des différents manuscrits du Bavli, les mentions de Yeshou ne se retrouvent pas à chaque fois.

 

Cela signifie-t-il qu'il faille rejeter le Talmud ? Aucunement. De même que personne suivant le Rabbi ne mettra les écrits Nazaréens de côté car ils contiennent certaines erreurs ou ajouts qui nous sont connus, de même la sagesse veut que l'on ne mette pas de côté la Guémara car des erreurs ou ajouts, qui nous sont aussi connus, s'y trouvent. Il y a tout simplement un travail d'étude de Torah à faire, afin de savoir quelles anecdotes sont des ajouts et sont non pertinentes, afin de les mettre de côté, voir les supprimer.

Une raison plus profonde

Dans son Likoutéi Moharân, Rabbi Nahmân de Breslev enseigne la chose suivante : "Il existe toutefois une personne [le Tsadik] qui agit volontairement en en toute connaissance de cause, et qui fait don de sa vie pour la sanctification du Nom Divin, c'est-à-dire, l'aspect de renommée qui est en lui, correspondant à la dimension de son nom, lié à son âme. En conséquence, même s'il est célèbre [en Haut], il n'est en réalité pas du tout connu [en Bas], et à l'inverse, tous parlent de lui et lui prêtent quantité d'histoires imaginaires [et négatives] qu'il n'aurait jamais imaginées lui-même. Il vit ainsi cela comme un véritable meurtre mais agit ainsi de manière intentionnelle, car il relève véritablement de la catégorie du sacrifice de soi, car le nom c'est l'âme, et c'est pour lui comme une véritable effusion de sang. De cette manière, il sauve Israël de ce qui devait normalement s'abattre sur lui, HaShem préserve, pour l'Unification. C'est en sacrifiant son nom, qui correspond à son âme, qu'il parvient donc à les sauver" (Torah n°260).

Ces anecdotes imaginaires au sujet de Rabbénou Yeshou'a, contenues dans la Guémara, salissent le nom du Tsadik. Que l'on considèrent qu'elles concernent toutes le bèn David ou non, elles ont néanmoins façonné son image au yeux d'Israël. Cependant, il utilise cela à son avantage, pour continuer, par cette souffrance, à sauver Israël de décrets plus durs encore.

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